| vanille300 | | Administratrice |
|  Posté le 06-08-2006 à 11:55:39  
| "Ca ne m'intéresse pas, je pense que c'est horrible. La seule idée que l'on tire un film du 11-Septembre me dérange", dit Jessica Amato, résumant le sentiment de nombreux New-Yorkais à quelques jours de la sortie du film d'Oliver Stone, "World Trade Center".
Dans la ville traumatisée il y a juste cinq ans, la sortie le 9 août du premier grand film consacré aux attentats new-yorkais, inspiré de l'histoire vraie de deux policiers miraculeusement sortis des décombres, suscite le débat, et souvent les réticences.
Mary Schneidman, mère de famille vivant dans la banlieue chic, ira le voir: "J'aime bien Oliver Stone, il a des positions souvent justes".
Jessica Amato, une enseignante de 40 ans, au contraire s'insurge: "Ca suffit de vivre ça une fois. Je n'ai aucune envie de payer pour le revivre sur écran. Je n'aime pas non plus voir les gens se photographier devant le site. Pour moi, c'est un territoire sacré".
"World Trade Center" a eu droit jeudi soir à New York à une première très hollywoodienne, avec sur le tapis rouge l'équipe du film, des célébrités (Sting), mais aussi de fameux responsables locaux (l'ancien maire Rudolph Giuliani), des rescapés et des proches de victimes.
Parmi eux, Mary Fetchet, qui a perdu son fils dans une des tours.
"Ce genre de film est très important: l'histoire doit être racontée", dit-elle, tout en admettant qu'à New York "certains peuvent tolérer ces images, d'autres non. A chacun de voir".
De fait, Carie Lemack, qui a perdu sa mère, fuit les salles de cinéma depuis que la bande-annonce a commencé à y être montrée, en mai: "Je ne veux pas voir le meurtre de ma mère". Pour elle, le réalisateur aurait dû aussi en profiter pour faire passer un message d'action: "J'aurais aimé que le film mobilise le public, et évite de le laisser juste avec un sentiment de tristesse ou de choc".
Oliver Stone, dont le film a été salué par une bonne part de la critique y compris new-yorkaise, s'est pourtant entouré de précautions. "Il est important de se souvenir, les gens oublient déjà, et les enfants doivent savoir", a-t-il répété jeudi à New York. Une part des recettes seront aussi reversées à des associations de victimes.
Mais, quelques mois après les modestes performances au box-office américain du film "United 93", consacré à l'avion détourné tombé en Pennsylvanie, une partie de New York garde sa réserve face à ce nouvel opus.
"Je déteste ce film", déclare tout de go vendredi Cindy Adams, vénérable éditorialiste du New York Post. "Les New-Yorkais portent une telle émotion que pour l'instant rien ne pourrait exprimer sur écran ce qui déchire encore nos entrailles".
Hugh Dyllon, juriste, est venu voir les stars, Nicolas Cage notamment, à leur arrivée à la première jeudi. Mais pas question pour lui de voir le film.
"C'est trop sensible. Cette histoire est trop familière, et je passerais mon temps à pleurer", dit-il. "C'est comme si ça s'était passé hier. Le métro s'arrête dans un tunnel et je pense à un attentat. On a une panne de courant et je m'inquiète. Non, je ne pense pas que beaucoup de New-Yorkais iront le voir".
Le Dr Stephen Levin dirige à l'hôpital Mount Sinaï une unité chargée de suivre les troubles physiques et psychologiques des secouristes et déblayeurs du 11-Septembre. "La grande majorité de mes patients disent n'avoir aucune envie de le voir, parce qu'ils portent déjà trop de souvenirs de ce qui s'est passé", affirme-t-il, relevant que certains fuient même la ville à chaque anniversaire.
Le syndicat de police de l'Autorité portuaire de New York, qui a perdu 37 hommes le 11 septembre 2001, a d'ailleurs déjà averti ses membres du risque de choc traumatique s'ils décidaient d'aller voir le long-métrage.
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